La cinémathèque de Corse

D'une île à l'autre


Corse-matin • 29 août 2022 • article de Laurent Hérin

Il y avait cette soirée dédiée au réalisateur Thierry de Peretti, celle consacrée à Marie-Jeanne Tomasi, l'exposition des photos d’Olivier Laban-Mattei, la dédicace du livre de Laure Limongi ou encore la projection, en compétition, dArabbaciu, court-métrage d'Alexandre Oppecini. Cette année, la Corse était à l'honneur au festival du film insulaire de Groix. Sur cette parcelle de terre de 11 km peuplée, l'hiver, de 2 360 habitants, les artistes corses s'en sont donné à coeur joie et ont ravi un public venu en nombre fêter la 21ème édition de l'événement. Le jury, présidé par Annick Peigné-Giuly, journaliste et directrice du festival Corsica.doc, a remis le grand prix, LÎle d'or, au documentaire 140 km à l'ouest du paradis; de Céline Rouzet, qui sortira en salle le 21 septembre prochain. Le jury jeune, composé de collégiens, a distingué Natura, le peintre et l'invisible de Zoé Lamazou, fille de Titouan, dans la catégotie documentaire. et Le Noyé, un film danois de Luc Ferez pour la fiction. Enfin, le Prix du public est revenu à Ostrov, l'île perdue, réalisé par Laurent Stoop et Svetlana Rodina. Ce sont également ces derniers qui ont obtenu le Prix Lucien Kimitété, dédié au documentaire le plus « humain » de la sélection.

Audrey Pesché, en chaîne de la direction artistique et de la coordination du festival de Groix, revient sur les moments forts de la manifestation.
Pouvez-vous nous présenter le festival ? Le festival international du film insulaire de Groix est avant tout une manifestation consacrée aux cinémas insulaires : des documentaires en priorité, mais nous proposons également des courts et des longs-métrages. Chaque année, nous invitons une ile. Nous avons déjà reçu les Marquises, Cuba, la Sicile ou encore l’Irlande. Petit à petit, autour de cette compétition de documentaires. le festival s'est agrandi. Multidisciplinaire, il propose aujourd ’hui des concerts, des expositions, une librairie, de l'art vivant, etc.
Pourquoi avoir invité la Corse ? C'est une idée que nous avons depuis plusieurs années. La Corse est proposée chaque année par le comité mais on se dit à chaque fois qu elle est proche de nous et qu’il vaut mieux d'abord aller voir plus loin. L'an dernier, face au Covid et à la difficulté de recevoir certains invités, nous avons pensé qu'il était temps de se rapprocher de notre invitée. Groix étant avant tout un festival d’échanges, il est essentiel, même indispensable, que les films soient accompagnés par les équipes.
Quel a été l'accueil de cette sélection corse ? L’accueil a vraiment été excellent. Nous avons proposé plus de 30 films sur la Corse et le choix a été particulièrement difficile. Il y avait tellement de matière que nous avons du rajouter une journée au festival pour tout diffuser. Le public a beaucoup aimé les différentes propositions et on s'est rendu compte à quel point le destin de nos îles était lié. Le débat qui a suivi La Part du rêve de Jean Froment, sur la question du foncier agricole, a passionné les foules. Tout comme la rencontre avec Julie Pérreard, après la projection de Paul Quastana, portrait de campagne(s). Le public a aussi eu un coup de coeur pour Les Salines, le petit prince et ma mère de Jean-Louis Tognetti et, évidemment, pour Marie-Jeanne Tomasi. Un sacré personnage à qui nous avons consacré toute une soirée !
Deux soirées spéciales étaient effectivement dédiées à des réalisateurs corses, Marie-Ieanne Tomasi et Thierry de Peretti. Peut on parler d'une "patte" insulaire ? Le public a beaucoup apprécié leur travail et leur regard sur la société corse. Ils ont longuement échangé avec Marie-Jeanne. Thierry, trop occupé par la préparation de son prochain film, À son image, n'a malheureusement pas pu venir mais il nous a envoyé une vidéo. Je pense sincèrement que l’on peut parler d’un cinéma insulaire pas dans la forme évidemment mais dans le choix et le traitement des sujets. Je fais le parallèle avec d'autres iles que nous avons reçues : on se retrouve sur certaines problématiques communes. C’est d’ailleurs ce que nous souhaitons mettre en lumière dans les débats à l’issue des projections. Même quand ils ne sont pas prévus, la discussion et les échanges avec le public se créent naturellement et continuent parfois jusque très tard (rires). Nous essayons aussi de créer du lien entre les artistes invités. Comme cette année entre Jean Froment et Marie-Jeanne Tomasi. Ils se connaissaient mais ne s’étaient jamais rencontrés, c'est désormais chose faite ! Comme je le disais, le propre du festival de Groix est de créer du lien et de l'échange...
Un moment particulièrement fort de cette édition? On se souviendra longtemps de la venue du groupe Tavagna et je pense qu'eux aussi (rires). Ils sont partis de Corse le jour des violents orages. Du coup, ils sont arrivés à Nantes avec deux heures de retard. Le bus qu'ils étaient censés prendre était parti. Nous leur avons trouvé des taxis pour les conduire à la gare, mais là : alerte à la bombe à l’aéroport ! Ils étaient répartis sur deux voitures puisqu’ils étaient neuf. Quatre ont réussi à attraper le train quand les cinq autres sont restés à quai. Le train suivant les faisait arriver à 19 h 38 alors que le dernier bateau qui part de Lorient est à 19 h 45... Notre seule chance était de demander au commandant d'attendre. Ils ont réussi et pour le remercier, ils sont allés au poste de commandement chanter pour lui (rires). Ce type de moment, on ne vit ça que pendant un festival. Au-delà de cette aventure, une fois sur l'île, Tavagna a fait un carton. Généreux et complices, ils se sont produits dans une chapelle, une église, ils ont même chanté à l'issue de la projection du documentaire qui leur est consacré. J'ai vu des gens pleurer en les écoutant. C'était vraiment très fort.
Malgré les aléas, un programme qui n'a pas été improvisé... Le résultat de votre venue cet hiver en Corse pour préparer cette édition ? Oui. je suis venue en février avec mon collègue Laurent Morisson qui est en charge de la partie concerts et musique. Nous avons passé huit jours incroyables, riches de rencontres et d'échanges. C'est un plus de pouvoir se déplacer et je ne suis pas sûre qu’on puisse le faire pour notre prochaine invitée : l'Écosse. J'étais déjà venue en Corse, je connaissais surtout le nord de l'île mais sans plus. Nous n'étions pas là pour visiter mais on s'est régalé et chacune de nos rencontres a permis d'enrichir la programmation. Ça nous a évidemment donné envie de revenir et je pense qu’à l'issue de cette édition, nous ne sommes pas les seuls. Beaucoup de Groisillons vont vouloir découvrir votre île !
PROPOS RECUEILLIS PAR LAURENT HERIN
D'une île à l'autre

           

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